Voilà un sujet bien délicat que je souhaite aborder aujourd’hui, car en dehors des cas généraux, des témoignages anonymes, je vais vous parler de NOTRE vie de famille depuis que le SJSR s’est invité chez nous. Cela tient de l’intime, encore une fois, mais il est nécessaire d’en parler parce que la maladie joue un rôle important dans notre vie. Tous les malades (pour bon nombre de maladies) le disent !

Revenons à la maladie d’Ekbom (je dois vous familiariser avec le nouveau nom du SJSR), et de son impact dans notre foyer.
Dès le début de la maladie, les choses furent difficiles car dormir avec une personne souffrant de ce syndrome relève du combat de boxe, où il faut éviter les coups, les parer, et arriver à dormir malgré le « bazar » que fait le conjoint à côté.
Encore plus compliqué, lorsque le conjoint malade se lève pour marcher, déambule dans la maison sans bruit, se heurte aux meubles, allume les lumières, revient se coucher, pour se relever très vite car son corps bouge sans cesse.
Pour le conjoint « bien portant », c’est aussi un calvaire : l’inquiétude permanente, l’impossibilité de soulager la douleur, la fatigue aussi à force de nuits blanches ou entrecoupées.

En ce qui nous concerne, nous avons eu, en 7 ans de maladie, des périodes très difficiles et fatigantes, et d’autres, où l’on pouvait presque se reposer.
Durant 5 ans environ, on a alterné ses périodes difficiles avec d’autres périodes où le traitement permettait d’avoir une vie presque normale.
Malgré tout, même pendant ces périodes plus calmes, nous étions obligés d’avoir un rythme de vie très « minuté », d’avoir toujours les mêmes heures de levé et de couché, et cela, sans nous gêner outre mesure, ne facilite pas toujours les relations sociales. Je traiterai de ce sujet dans un prochain article.
Revenons à notre vie de famille : tant que nous vivions à deux, Papa Didou et moi, c’était relativement simple car il était facile de manger à la même heure chaque soir, pour pouvoir prendre mon traitement à heure fixe, puis se coucher.

Puis, il y a eu la grossesse, et un petit garçon est entré dans notre vie. Comme dans toute famille, la vie est bouleversée lorsqu’un enfant vient au monde. Pour nous, le choc a été terrible.

D’abord la grossesse (je détaillerai aussi cela dans un prochain article).
Avec un sjsr, les grossesses peuvent se passer de 2 façons :
- soit le sjsr « disparaît » le temps de la grossesse
- soit le sjsr se renforce (d’autant qu’il faut cesser le traitement pour le bien du bébé)
Pour moi, le second cas s’est appliqué. Les 8 mois et demi de grossesse ont été très éprouvants, épuisants, et douloureux. La douleur ne m’a guère quittée pendant presque 9 mois.
Papa Didou se levait avec moi la nuit pour m’aider à marcher, à ne pas tomber. Il se mettait autour de moi, sur le bord du lit, pour que je puisse « marcher » en étant assise, et en dormant tout en marchant.
Il m’a soutenu, tous les jours et toutes les nuits. Merci Papa Didou, sans toi, je n’aurai jamais pu aller jusqu’au bout de cette grossesse !

Après l’accouchement, j’ai repris mon traitement, sauf que l’on n’avait pas anticipé et réfléchi que l’on serait trois désormais. Avec un bébé qui a faim la nuit et le jour, d’autant que notre petit Didou a souffert d’un gros reflux, et que l’on ne pouvait pas le poser ni dans son lit, ni dans le transat. Il n’était bien qu’en position debout (l’écharpe de portage nous a sauvé !!!).
Papa Didou et moi, nous nous relevions la nuit pour le faire dormir debout : Papa Didou faisait la première partie de nuit jusqu’à 4 h du matin, et je prenais la suite…

Aujourd’hui, Didou a 17 mois, dort dans son lit, et a des horaires pratiquement réguliers.
Malgré tout, il nous est encore difficile d’avoir des horaires de levé et de couché réguliers, parce qu’il nous faut préparer ceci ou cela, parce que nous passons un long moment à discuter, pour passer un moment tous les deux, pour tout un tas de raisons finalement..
La maladie n’est pas vraiment maîtrisée, et même si j’arrive bien souvent à vivre comme tout le monde, le soir venu, tout est différent.
Je m’aperçois aujourd’hui que ma maladie a beaucoup de répercussions sur notre vie de famille et sur notre vie de couple.
Papa Didou est fatigué, épuisé, non pas par son travail, mais bien par ses 7 ans de maladie qu’il subit tout autant que moi.
Didou, lui aussi, subit cette maladie, car si maman Didoune est fatiguée, Didou ne va pas à la piscine, ne fait de dessins, reste à la maison ou dans le jardin. Et lorsque maman Didoune a mal, elle ne réagit pas toujours très bien et dispute le Didou, alors que la petite bêtise n’était pas grave du tout..
Papa Didou a le droit, quant à lui, à la soupe à la grimace en rentrant le soir du travail lorsque maman Didoune est à bout, et qu’elle ne supporte plus rien.
J’ai conscience que je ne suis pas facile à vivre, que mes hommes n’ont pas à subir tout cela, et pourtant…
Il y a une différence entre savoir et se l’entendre dire. Aujourd’hui, j’ai compris.
Je n’ai pas de solution miracle, mais je vais faire mon maximum pour que Papa Didou retrouve un peu d’énergie, pour qu’il ne s’épuise plus à s’inquiéter pour moi, pour nous.
Le SJSR, c’est comme un tunnel dont on ne voit pas le bout, et le pire est qu’on emmène notre famille avec nous. Seulement, je ne le veux pas, mes hommes ne méritent pas ça ! Il faut que l’on sorte de ce tunnel, il faut qu’on sorte la tête de l’eau !
Cette maladie a fait beaucoup de mal à notre couple, à notre famille. Cette maladie n’est pas anodine, et beaucoup de gens en souffrent, même si ils n’en sont pas atteints.
Il faut une grosse dose d’amour, de la patience, des compromis pour s’en sortir. Papa Didou, et mon Didou, on ne « lâche » rien, ce n’est pas cette foutue maladie qui va nous détruire, non mais !! ;)